BIODIVERSITE ET EOLIENNES INDUSTRIELLES

Biodiversité et éolien : un jugement exemplaire de Cour d’Appel de Lyon pour la protection des oiseaux,

 

En 2013-2014, les Associations Défense de l’environnement des monts du Forez “, et “Vent libre”, se sont opposées à l’implantation de 5 éoliennes de 150 de haut dans le parc naturel du Livradois Forez à quelques km du col de Baracuchet (63). Là, passent de très nombreux oiseaux migrateurs. La Cour Administrative d’Appel de Lyon vient de leur donner raison en annulant l’arrêté du préfet d’autorisation d’exploiter, et ce,  pour préserver la  biodiversité (CAA de Lyon N°16LY00597-30 octobre 2018). Elle considère notamment que :

 

  • le projet de parc éolien de Saint-Clément-de-Valorgue, situé dans une zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF), à 13,6 km d’une zone Natura 2000 dédiée à la protection de l’avifaune, aurait été implanté en crête, perpendiculairement à l’un des axes majeurs de migration des oiseaux à travers le massif du Forez, utilisés notamment par des grands voiliers et des rapaces, au nombre desquels le Milan royal, espèce protégée au titre de l’annexe 1 de la directive du 30 novembre 2009 susvisée, quasi menacée au niveau mondial et vulnérable en France, ou par la grue cendrée, protégée au même titre et vulnérable en France et en Europe
  • les espèces concernées sont fortement sensibles aux éoliennes et volent à cet endroit à basse altitude ;
  • des passages post-nuptiaux importants ont été relevés sur le site, qui ont lieu en majorité dans la zone d’influence des éoliennes ;
  • compte tenu de l’emplacement et de la hauteur des aérogénérateurs,  il y a des risques élevés d’effet arrière et de collisions pour les oiseaux migrateurs en transit
  • l’étude d’impact souligne la nécessité, à cet égard, de mener ” une réflexion forte sur la faisabilité d’un projet éolien sur ce site ” ;
  • le commissaire enquêteur a estimé que l’arrêt des éoliennes en période migratoire était ” une condition sine qua non du projet ” ;
  • l’arrêté en litige prévoit, dès la mise en service du parc éolien, l’expérimentation d’un radar de détection des espèces d’oiseaux en migration asservissant l’arrêt, de jour comme de nuit et toute l’année, du parc ou des éoliennes concernées lors du passage des oiseaux, assortie du comptage, tous les trois jours, de la mortalité des oiseaux et d’un suivi par un comité scientifique ; toutefois, il résulte des termes de l’étude d’impact que le radar expérimental envisagé n’a jamais été testé sur un parc éolien en fonctionnement ;
  • l’efficacité et la fiabilité de ce dispositif ne sont pas établis ; en particulier, il n’est pas démontré qu’il garantisse un arrêt des machines suffisamment rapide pour éviter les impacts ;
  • d’autre part, si l’arrêté préfectoral  prévoit qu’en cas de dysfonctionnement de ce radar expérimental, les éoliennes seront arrêtées de 10 heures à 17 heures d’août à octobre, voire pendant 15 heures par jour au mois d’août, et que cette amplitude pourra être ajustée en fonction du mois de migration considéré et des résultats des suivis de mortalité, cette alternative ne tient cependant compte ni des migrations prénuptiales intervenant au printemps, qui ont pourtant été identifiées sur le site par l’étude avifaunistique, ni des migrations nocturnes, qui ont également été détectées ;
  • par ailleurs, l’arrêté en litige est silencieux sur les mesures susceptibles d’être mises en place pour le cas où le comptage ferait apparaître une mortalité élevée ; qu’en outre, aucune mesure précise de coordination avec le parc éolien de Gumières (Loire) à proximité immédiate du parc de St-Clément-de-Valorgue et comprenant 8 aérogénérateurs, n’est exposée permettant un arrêt concerté des machines en vue d’éviter ou de limiter l’atteinte portée aux espèces migratrices ;
  • enfin, ainsi que l’a souligné le commissaire-enquêteur dans son rapport, non contredit sur ce point par la SAEML Eole-Lien du Livradois-Forez dans son mémoire en réponse, lequel ne traite que des bridages liés aux contraintes acoustiques, le business plan ne tient pas compte des périodes d’arrêt des machines liées à la protection des migrateurs dans l’évaluation de la production d’électricité, pourtant susceptibles d’avoir un impact sur la viabilité économique du projet
    dans ces conditions, les mesures envisagées n’étant pas de nature à éviter ou à réduire les effets sur l’avifaune de la mise en fonctionnement d’un parc éolien à l’emplacement envisagé, l’arrêté du préfet du Puy-de-Dôme du 28 avril 2014 est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation au regard des dispositions précitées de l’article L. 511-1 du code de l’environnement ;

 

pour lire le jugement complet : https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?oldAction=rechJuriAdmin&idTexte=CETATEXT000037563122&fastReqId=1926630992&fastPos=5

 

Milan royal

Photo de Jean-Pierre BOULHOL